Le 19 octobre dernier, les Productions Martin Leclerc présentaient, à la Cinquième salle de la Place des Arts, le tour de chant « Brel et Barbara, ces héros fragiles. » Devant une salle comble, les comédiens- chanteurs Julie Daoust et Renaud Paradis nous ont fait revivre, à travers les mots et les chansons des deux grands poètes-chanteurs, la grande amitié qu’ils ont partagée. Au piano, l’excellent Philippe Noireaut les accompagnait et partageait leurs espiègleries…
Les deux chanteurs signent également la conception et la mise en scène de ce théâtre musical, très bien orchestré. Cette heure et demie de chansons, de paroles et d’extraits sonores est comme un livre d’images dont on feuillette chaque page avec ravissement.
L’angle choisi pour nous parler de ces deux grands de la chanson est très intéressant : peu d’entre nous connaissaient l’amitié qui les avait liés toute leur vie. C’est à travers cette constante interaction que l’on a appris plusieurs éléments de leurs vies et qu’on a ainsi pu les connaître davantage de l’intérieur.
Brel et Barbara : leur vécu, leurs personnalités…
Brel était quelqu’un qui pouvait être très drôle, original et fanfaron. Espiègle, il aimait faire rire et avait ses propres vues sur tout. Ainsi, il a toujours refusé les « rappels », car il considérait cette tradition comme démagogique. Il tenait aussi à ses idées. Ainsi, lorsque la foule l’a hué lors de l’interprétation de la chanson « Les Flamandes », au lieu de se taire, il l’a plutôt recommencée… Il a suivi son propre chemin, contre l’avis de sa famille – et affrontant tous les obstacles- et cela s’est conclu, comme on le sait, par une victoire totale sur l’adversité. On a aussi appris qu’il travaillait sans relâche, pouvant chercher le mot juste pendant parfois des semaines et des mois…
Barbara, elle, comme la plupart des auteurs, était quelqu’un qui doutait beaucoup d’elle-même. C’est seulement en chantant à Brel, au téléphone, sa chanson « Dis, quand reviendras-tu? » qu’elle s’est aperçue qu’elle détenait là une véritable pépite, qui la ferait connaître du monde entier…
On sait aussi que c’est suite à l’abus sexuel de son père qu’elle a composé la chanson « L’Aigle noir » et qu’elle a refusé de le revoir, jusqu’à sa mort.
La genèse des chansons
La genèse des chansons est, bien sûr, tributaire de l’enfance et du passé des compositeurs …
L’enfance de Brel, selon ses propres dires, a été très ennuyeuse. Le jeune Brel avait en horreur les valeurs de ses parents. Son père, flamand, était bourgeois et n’appréciait pas du tout que son fils devienne chanteur. La chanson « Les Flamandes » reflète bien l’aversion de Brel pour leurs valeurs bourgeoises et insignifiantes. De même, Brel a écrit la chanson « Les Vieux » en pensant à ses parents.
Conception et mise en scène
La conception du spectacle est bien pensée et équilibrée. Les créateurs ont trouvé l’équilibre dans l’exploration de la vie/œuvre de Brel, de celle de Barbara et d’un troisième élément, constitué de leur amitié. En très peu de temps, on a pu saisir plusieurs aspects de leur personnalité et des éléments-phare qui ont présidé à la création de leur œuvre. Le spectacle fait aussi la part belle aux chansons, ce que le public attend avec joie, bien entendu.
L’interprétation de Renaud Paradis est très vivante, imagée à souhait et convaincante. Le public rit à plusieurs occasions et reconnaît bien les mimiques de Brel dans plusieurs de ses interprétations.
Julie Daoust, interprétant Barbara, a aussi trouvé le ton juste, en interprétant les chansons d’une façon plus intérieure, à l’image de Barbara.
Ainsi, pendant une heure et demie, on revit, sans aucun temps mort, la vie de ces deux grands géants de la chanson française.
On découvre, bien enroulés dans une ouate de douceur, de plaisir et de sensibilité, une page d’histoire de deux géants de la chanson française…
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