Il est des spectacles qui marquent à jamais et dont on se souviendra toute sa vie. Celui de Charlebois et de l’OSM, intitulé Charlebois symphonique, en est un… « Ô Temps, suspends ton vol » (Lamartine).
Pour les 80 ans de Robert Charlebois, l’OSM a concocté un concert de grande envergure, avec l’orchestre au complet, une partie du choeur et les deux excellents solistes Rose Naggar-Tremblay, contralto et Frédéric Antoun, ténor. Les arrangements des chansons ont été complètement réorchestrés pour l’Orchestre symphonique par le très talentueux Hugo Bégin, qui y a consacré des milliers d’heures de travail passionné. Et c’est un Jacques Lacombe heureux, complice et conscient du caractère historique du concert, qui a dirigé l’OSM avec rigueur, talent, sens de l’humour et excellence…
Les chansons…
Charlebois a fait doucement son entrée, avant d’entamer « Deux femmes en or » et « Mont Athos ». Il s’en est fallu de peu pour que l’Orchestre l’enterrât. Heureusement, l’équilibre du son s’est rapidement rétabli et on a pu alors assister à un moment de grâce, alors que la cantatrice Rose Naggar-Tremblay a accompagné Charlebois de sa voix lyrique, dans « Sensation ». Ces univers opératique et populaire, qui autrefois se battaient froid, forment ici une belle symbiose.

La chanson Madame Bertrand, interprétée conjointement par une Rose Naggar-Tremblay aussi kitch que drôle et un Charlebois tout aussi fou, était tout simplement savoureuse. Ce fut un moment fort et rigolo du spectacle, imprimant un large sourire à l’assistance, qui l’a spontanément applaudi. La première partie s’est close sur « Ordinaire », interprétée de façon très intérieure – comme je ne l’avais jamais vue! – par un Charlebois ému, vibrant et sensible.
La poésie et la musique…
Au retour, tel que nous l’a expliqué Jacques Lacombe, « Terre Love » est un mix des paroles de Alfred Jarry, un poète français de la fin du XIX ème siècle et les Canons de Pachelbel, du compositeur allemand Johann Pachelbel, de la fin du XVII ème siècle. C’est un hymne à la paix et au respect de la patrie, chanté par Frédéric Antoun et Rose Naggar-Tremblay avec beaucoup de prestance, la main sur le cœur. Deux siècles les séparent, mais un message de paix et de beauté les unit. On retrouve ensuite un Fu Man Chu complètement réorchestré, avec l’orgue en entrée, sifflements très justes de Charlebois et son clin d’oeil à l’époque des party des années 70…
La chanson « La fin du monde » réunit les 2 solistes et Charlebois. Dans le dernier vers « Et les anges se mirent à hurler », les trois chanteurs terminent sur une note différente, exprimant bien le chaos de la fin du monde. Charlebois laisse alors toute la place à Rose Naggar-Tremblay, qui s’éclate, dans des envolées lyriques libres et magnifiques, applaudies par un Charlebois admiratif … et une salle impressionnée et ravie.
Puis, on a lu entre les lignes…
Lindberg, rendant bien l’atmosphère des années 70, a été accompagné par de subtiles et belles envolées de la contralto.

A suivi un « Je reviendrai à Montréal », interprété de façon très sobre et intérieure par un Charlebois recueilli, annonçant la fin du party…
Puis, sont venus les adieux…
Déchirants, beaux, troublants, émouvants, réalistes et tristes… avec « Ne pleure pas si tu m’aimes », et, dans un deuxième rappel : « Et voilà »
Et voilà, tout est dit, tout est fait…
Charlebois, étranglé par l’émotion et une salle tout aussi remuée, se saluent pour une dernière fois.
Un moment d’anthologie. Un ange passe…
Un concert exceptionnel, mémorable.
Et le public qui le salue bien bas, le cœur en miettes…
Merci pour tout, Robert Charlebois.
Le concert sera repris ce soir et demain soir, les 23 et 24 août, à la Maison symphonique.
Crédit photos: Antoine Saito
http://www.robertcharlebois.com/